Le Blogue de Maurice Roussel

Jean-Baptiste-François Deschamps de la Bouteillerie, jeune officier de 28 ans originaire de Cliponville en Normandie, vint en Nouvelle-France en 1671 comme officier du régiment de Carignan-Salières. Très estimé de l’intendant Jean Talon, il obtint de celui-ci, qu’il lui concède une seigneurie sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent. En 1672, il devint donc seigneur d’un vaste territoire de deux lieues de front sur une lieue et demie de profondeur (8 kilomètres sur 6), situé entre l’embouchure de la rivière Houelle en descendant au Nord-Est vers les caps Mouraska et que le jeune seigneur entendait bien développer avec succès.

En 1674, il prit possession de sa seigneurie. Avec lui, deux charpentiers, Damien Bérubé et Robert Lévesque, deux maçons et quatre manoeuvres. Bérubé et Lévesque construisirent le manoir du seigneur dans les terres, à l’endroit où se trouve actuellement l’église de Rivière-Ouelle. Il fallait ensuite ériger un moulin banal mais le courant de la rivière n’était pas assez fort. Il eut fallu monter beaucoup trop loin vers le sud. On construisit donc un moulin à vent dans au lieu appelé l’Éventail. Mais ce moulin donna tellement de problèmes au seigneur, que vers 1700, il décida tout simplement de l’abandonner et de chercher un autre endroit plus convenable.

La Bouteillerie était faite de grandes terres cultivables et de forêts abondantes en gibier pour la nourriture et les fourrures. Le fleuve, qui constituait la seule voie de communication, fournissait en quantité une grande variété de poissons. Voilà ce qui attirait de nombreux colons qui vinrent rejoindre Damien Bérubé et Robert Lévesque: des Paradis, des Dubé, des Bouchard, des Plourde, des Soucy, des Émond, etc. Ces premiers colons arrivèrent dès 1674 et commencèrent à défricher les lopins de terre qui leur étaient concédés par le seigneur. Les premiers arbres abattus servaient à construire les premières maisons. Pendant plusieurs années, les habitants ne pouvaient pas vivre uniquement de leur terre. Ils pratiquaient aussi la chasse et la pêche, et le commerce de fourrures était pour eux un apport financier important qui leur permettait de subvenir raisonnablement aux besoins de leur famille.

Le seigneur de la Bouteillerie meurt dans sa seigneurie en 1703 et deux fils lui survivent: Charles, prêtre au séminaire de Québec et Henri-Louis, officier de la marine. Ils se partagent les biens de leur père mais en 1706, Charles fera cession de ses droits en faveur de son frère Henri-Louis, qui est un homme très en vue dans les milieux militaires et gouvernementaux, pour avoir contribué à la construction des fortifications de Québec. Dorénavant, c’est Henri-Louis qui s’occupera activement de la seigneurie.

En 1749, la seigneurie de la Bouteillerie est très active. Les habitants vivent heureux. Henri-Louis Deschamps de Boishébert est mort. C’est Geneviève de Ramezay, sa veuve, qui s’occupe du fief avec ses collaborateurs:

Jean-Baptiste Dupéré, Major de milice
François Perreault, Major de milice
Nicolas Beaulieu, Lieutenant de milice
Jean Gagnon, Capitaine de milice
Joseph Miville, Aide-major de compagnie
Pierre Lancoignard, Navigateur
Michel Dupéré, Maître forgeron
Jean Blouin, Menuisier

Rivière-Ouelle connaît une relance économique importante sous l’administration de l’intendant Hocquart, qui favorise la production agricole, le commerce et l’industrie. Les goudronneries et le chantier naval sont très actifs. L’intendant Hocquart en poste depuis 1729, a établi une politique d’immigration intensive. De nouveaux colons arrivent régulièrement de France. Parmi eux, un breton d’Évran, Jacques Rouxel, qui désire s’installer dans la Bouteillerie. Un habitant, Joseph Levesque, qui exploite une goudronnerie, lui offre de demeurer chez lui et en attendant de s’établir sur une terre, Rouxel ne chômera pas; il travaillera comme engagé et comme journalier.